Photographie Jean-Michel Sordello
Elle transmet ses connaissances aux nouvelles générations à l’Institut de Formation en Masso-Kinésithérapie Niçois. Rencontre autour de son engagement, via ses spécialités et l’enseignement.
Après vos études de kinésithérapie à Lille, vous avez fait une formation en uro-gynécologie. Quels sont les enjeux de cette spécialité dans votre métier ?
« C’est une rééducation centrée autour du périnée. Elle vient à l’origine des pays du Nord, et elle est arrivée en France de façon assez discrète dans les années 1990. Puis, elle a pris une véritable ampleur. Les gynécologues se sont mis à la prescrire plus systématiquement car elle fonctionne bien. Elle est indiquée pré et post-partum chez la femme, avant et après une opération de la prostate chez l’homme, et en cas de dysfonctions urinaires ou d’incontinence fécale. Le kinésithérapeute intervient par guidage manuel ou biofeedback. L’électrostimulation est aussi très utile. Chez l’enfant souffrant d’énurésie, nous travaillons à la compréhension de ce qui passe de façon qu’il puisse gérer les moments de risque. »
Vous avez ensuite exercé en réanimation. Quel est le rôle du kinésithérapeute dans ce service ?
« Nous faisions au départ beaucoup de réveil musculaire et d’entretien des articulations. Puis on s’est mis à travailler sur le sevrage et la tolérance de la ventilation artificielle, ainsi qu’à la récupération motrice précoce après le retour de conscience. Les choses ont beaucoup évolué et l’on s’est intégré aux équipes de réanimation, en collaborant avec les médecins et infirmières. Dès les années 2000, le référentiel des actes s’est structuré. De sorte qu’aujourd’hui, un service de réa doit statutairement bénéficier d’un kiné 7J/7 et 24h/24. Dans ces moments où la vie est si précaire, l’essentiel se met en avant. Le kiné est ici l’un des rares intervenants qui n’a quasiment pas de gestes invasifs. On attend de lui qu’il prenne le temps, qu’il s’occupe du patient pour conserver sa motricité, parvenir bientôt à s’asseoir et se verticaliser. Le respect de la personne, c’est pour cela que l’on se lève le matin ! »
Titulaire d’un master en sciences de l’éducation, vous êtes aujourd’hui enseignante. Parlez-nous de la réforme de la formation des masseurs-kinésithérapeutes ?
« C’est l’une des dernières à finaliser son universitarisation. La réforme du diplôme a été lancée en 2006 par Xavier Bertrand, et ce n’est qu’en 2015 que la formation est passée de trois à quatre ans. Il y avait jusque-là une sorte de transmission empirique des connaissances, un peu comme du compagnonnage, et l’on souffrait du manque de validation académique des savoirs face aux techniques rééducatives que l’on mettait en place. Nous avons donc à l’IFMK Niçois fait table rase du passé pour mettre en place cette réforme avec les professeurs et l’université. L’idée a été d’instaurer des méthodes pédagogiques en lien avec les spécificités du métier, qui s’inscrit fondamentalement dans le monde de la santé, et où l’on travaille de concert avec les médecins et équipes soignantes. Il y a une composante très technique mais également éducative. Dans le cadre de maladies chroniques, si les patients peuvent être dépendants de machines pour respirer ou épurer leurs reins, nous les formons pour qu’ils conservent le plus d’autonomie possible ; qu’ils restent des personnes debout, même s’ils sont parfois couchés. »
Par Tanja Stojanov