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TRENDY

Des podiums à la rue, des complications horlogères aux parures extravagantes, des designers les plus en vogue aux nouvelles mobilités, les tendances lifestyle s’illustrent dans la rubrique Trends. Graphiques et épurées, ces pages décryptent en images les grands mouvements de la société, étudiés de manière transversale et racontent l’air du temps avec une vision globale et avant-gardiste. COTE rend accessible les détails les plus complexes, textes et visuels à l’appui.

avril 2016

Into the wild !

 
 INTO THE WILLE
 

L’année 2016 prône le retour à une nature sauvage. Telle est l’analyse du tendanceur François Bernard pour le dernier Salon Maison & Objet Paris.

 

Pourquoi parler une nouvelle fois de nature et s’interroger sur le thème du « wild » ?
François Bernard : Le monde contemporain à la suite de Descartes a voulu organiser et exploiter la nature. L’homme en était le maître. La nature n’avait aucun droit. Elle nous devait tout, et nous ne lui devions rien. Ce statut a changé. Aujourd’hui, on s’interroge : l’impact des activités humaines sur l’écosystème marquera-t-il la fin de notre espèce ? Nous découvrons notre responsabilité : nous avons des droits et des devoirs envers l’humain et le « non-humain » (l’animal, le végétal...). Résultat : plus que jamais, la nature apparaît comme un symbole de vitalité. Le mot « sauvage », qui qualifie étymologiquement celui qui habite la forêt et incarne la limite entre l’humain et l’animal, devient le principe de cette énergie vitale.

 

Comment expliquer cette fascination pour le sauvage ?
La domestication est devenue la doctrine d’un monde hyper technologique. Cette idéologie uniformise le vivant. Pour la première fois dans l’histoire de la création, une espèce – l’homme – prend le contrôle de son évolution. On est passé de l’idée d’un apprivoisement de la nature à l’émergence, via les biotechnologies, d’un vivant séparé de la nature. Face à un monde qui se dématérialise et un vivant augmenté artificiellement, le terme « sauvage » devient synonyme de naturel. Il incarne la pulsion de vie, le hasard et le refus de la norme culturelle.

 

Y a-t-il un vocabulaire de formes et de couleurs propres au sauvage ?
On parle de formes au caractère indistinct ou encore brut, et de couleurs qui tournent autour des gammes de jaune, vert, bleu verdi, kaki, brun terreux, mais aussi rouille, anthracite et brûlé. Les textures sont importantes notamment lorsqu’elles traduisent le tremblement du temps. Les effets « méchés » sont aussi recherchés avec, par exemple, le retour des tapisseries murales. Les longs poils de coton ou de laine remplacent la fourrure.

 

Pouvez-vous nous citer quelques créations qui illustrent ce thème ?
Je pense spontanément au banc Olmo de Il Labotorio dell’Imperfetto, qui ressemble à un tronc calciné tout droit sorti d’une forêt primaire, ou aux formes minérales de la collection Species, éditée par Fredrikson Stallard. Ici, des matériaux comme la fibre de verre sont travaillés pour reproduire des formes primitives. Les céramiques de la collection Adaptive Manufacturing d’Olivier Van Herpt sont aussi intéressantes. Réalisées en impression 3D, elles traduisent dans une technique de pointe les influences aléatoires de l’environnement. Ce goût de l’indéfini est parfaitement à l’œuvre dans les tapis imaginés par Helmut Lang pour Henzel Studio. Il y a aussi les planches d’herbiers développées par le studio Maarten Kolk et Guus Kusters pour Thomas Eyck, qui illustrent une forme de néonaturalisme. Et je trouve très inspirante la série de photographies du Suisse Charles Fréger, dans laquelle il montre des personnages en costumes issus du folklore chamanique européen. Il y a une poétique de la pensée magique et du symbolique que l’on retrouve par exemple dans la table Bigfoot d’e15, où sous le plateau de bois massif sont gravés des dessins quasi hiéroglyphiques.

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