Photographie Jean-Michel Sordello
Chef de service adjoint des urgences pédiatriques du CHU Lenval, spécialisé en recherche clinique et santé publique, il plaide pour une coordination accrue des données via l’intelligence artificielle.
Son cœur de métier aux urgences ? Gérer l’afflux des jeunes patients, le challenge étant évidemment de distinguer les cas graves afin de les prendre en charge au plus tôt. Car il faut savoir que le CHU Lenval est le quatrième service d’urgences pédiatriques en France, avec 60 000 passages par an. Mais Antoine Tran a également une seconde spécialité professionnelle. En plus de ses études de médecine, ce jeune pédiatre s’est aussi lancé dans une maîtrise puis aujourd’hui une thèse en santé publique. Et c’est à la Harvard Medical School de Boston que cet enseignant-chercheur a acquis ses compétences en matière de big data. Pour son doctorat, il a donc décidé de se concentrer sur un projet ambitieux : la création d’une plateforme unique regroupant les données des patients de l’hôpital Lenval. Une idée née d’un constat simple dans son service : « À l’heure actuelle, nous travaillons sur un logiciel de biologie, un autre d’imagerie, un logiciel de prescription médicale et le logiciel d’urgences de l’Agence Régionale de Santé qui relie plus de soixante-cinq hôpitaux en PACA. Cela fait pour chaque patient des fiches dans quatre logiciels, sachant que cette multiplicité se retrouve dans toute la France ! »
Pour une trajectoire de A à Z
Au-delà de son usage en interne, cette plateforme numérique pourrait aller plus loin. « L’idée serait d’appliquer ce modèle pour optimiser les parcours de notre bassin de patients, de Nice à Fréjus en passant par Antibes, Cannes et Grasse. Tout en respectant les réglementations et la protection des données individuelles, cela permettrait de faire le point sur la situation en temps réel et de détourner les patients sans danger vers des hôpitaux périphériques généraux ayant un service pédiatrique, comme par exemple le Centre Hospitalier d’Antibes. » Car aujourd’hui, c’est majoritairement l’inverse qui se produit, le flux de patients des villes voisines convergeant vers Nice. « C’est une manière de travailler en réseau, comme un Waze médical, qui pourrait peut-être voir le jour d’ici 10 ans », ajoute-t-il. Aujourd’hui, Antoine Tran étudie donc la brevetabilité de son projet, avec des entreprises spécialisées en intelligence artificielle. « L’I.A. permet en effet de gagner du temps, en intégrant une infinité de données que le cerveau humain ne pourrait pas traiter si vite. Elle peut ainsi tenir compte des effets saisonniers des maladies pour interpréter des images médicales ou nous prévenir de nous préparer s’il vient d’y avoir un accident impliquant de nombreux véhicules. » Et de conclure : « Pour autant, l’intelligence artificielle ne remplacera jamais l’humain. Elle n’est là que pour suggérer des interprétations possibles, à partir de niveaux de probabilité. » Un projet à suivre.
Par Eve Chatelet
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