Photographie Jean-Michel Sordello
Hépatologue de renom, le Pr Albert Tran a beaucoup appris de ses mentors et fait fructifier cet héritage au CHU de Nice. Une carrière sous le signe de l’excellence…
Que de chemin parcouru depuis son arrivée en France ! « Une trajectoire de vie un peu particulière, précise d’emblée le Pr Albert Tran. Je suis né à Saïgon au Vietnam, pays que mes parents ont quitté en 1968 pour fuir la guerre et s’installer à Montpellier. » Un nouveau départ pour cette famille d’origine chinoise, qui a tout abandonné. Rien ne prédestine alors le jeune Albert à une carrière de médecin. À 9 ans, il parle à peine le français. Pourtant, il va réaliser une scolarité et un cursus universitaire exemplaires, récompensés par une mention « Très bien » au baccalauréat, la Médaille d’or des Hôpitaux (1989), un Doctorat en médecine (1989) et un Doctorat d’université Sciences de la vie (1996) avec félicitations du jury à chaque fois… Lui reste modeste, remerciant l’Éducation nationale pour l’enseignement reçu, ces bases solides qui lui ont permis de prendre « l’ascenseur social ».
Des rencontres déterminantes
Aujourd’hui, Chef de service de l’Unité d’hépatologie à l’Archet 2, fondateur et responsable du Centre Expert Hépatite C, le Pr Albert Tran est aussi Vice-Président Recherche au directoire du CHU de Nice. Il a également été Président du Conseil National d’Université dans sa discipline. Une carrière jalonnée de rencontres déterminantes : « J’ai eu la chance d’être remarqué et aidé par des personnes brillantes », confie-t-il. Premier mentor, le Pr Patrick Rampal, « mon patron en Hépato-gastrologie, doyen de la Faculté
de Médecine de Nice, qui avait besoin de quelqu’un pour “faire le foie” ». Avec le Pr Christian Bréchot, Directeur général de l’Inserm puis de l’Institut Pasteur à Paris, il approfondit les maladies du foie, en particulier l’étude des virus : « Il m’a fait découvrir la recherche clinique chez l’homme ». Le Pr Jenny Heathcote de l’Université de Toronto lui apprendra comment construire une équipe de recherche clinique. Le Dr Sylvia Benzaken va l’aider à en poser les premières pierres. Et grâce au Dr Yannick Lemarchand, « scientifique de haut vol », il bâtira avec le Dr Philippe Gual dans les années 2000 l’équipe Inserm 8 sur les complications hépatiques de l’obésité. Sans oublier le Pr Pierre Michel, directeur du Centre de recherches cliniques du CHU de Montréal, qui le conseillera régulièrement dans ses choix stratégiques.
Donner plus de poids à la recherche
« En 2003, lorsque je suis devenu Chef du service d’Hépa-tologie au CHU de Nice, j’avais grâce à mes mentors une vision claire de ce que je voulais faire ». Ses objectifs de carrière ? Tout d’abord, mettre en place cette unité pour prendre en charge les malades graves. Afin d’obtenir des moyens financiers et humains, il décide de développer un projet en addictologie, spécialité que l’État souhaite alors soutenir. Le centre CAHUN*, structure de pilotage de toutes les addictions, voit le jour en 2008. Il désire par ailleurs créer un centre de recherche clinique de très haut vol pour accéder aux nouveaux traitements. Là encore, mission accomplie. Troisième priorité : « la recherche fondamentale pour être reconnu ». C’est chose faite avec les travaux de son équipe, labellisée Inserm en 2008, sur le foie gras. « Un combat important à mener » face à cette maladie émergente. « À 61 ans, conclut-il, j’ai réalisé les objectifs que je m’étais fixés. » Il n’en relève pas moins avec plaisir un nouveau défi : la restructuration de la recherche au sein du CHU de Nice en 12 consortia, pour lui donner plus de poids. Et ensuite ? « À la retraite, je quitterai définitivement l’hôpital. Je ne suis pas comme ces animaux, les paresseux, qui s’accrochent à l’arbre ! »
Par Christine Mahé
* Centre d’addictologie hospitalo-universitaire de Nice
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