mai 2017

Pierre Fauroux

  • Un engagement absolu

 

 
 Portrait 1 FOUROUX

 Diplômé de l'École polytechnique fédérale de Zurich, Pierre Fauroux a fondé son agence à Cannes en 1976. Installé depuis peu à Grasse, il a signé de nombreux projets publics et créations de villas.

Il a reçu le Prix Spécial du concours ArchiCOTE 2016 pour l’ensemble de son œuvre. Rigoureux, exigeant, l’architecte s’oppose directement aux règles d’un marketing sans attaches.

 

« Le papier à carreaux, la gom­me et le crayon sont la base. Ce sont les meilleurs outils pour faire un plan à l’échelle, lorsque l’on n’a pas une table à dessin
ou un ordinateur », témoigne cet ancien enseignant à l’École na­tio­­nale supérieure d’Archi­tec­ture de Marseille, qui inter­di­sait à ses étudiants d’aller à la biblio­thèque au moment de concevoir. Pour­quoi ? Pour ne pas se laisser infléchir à cet instant fondateur et parce qu’un projet n’est, par définition, jamais le même. L’archi­tecture a du sens sur le terrain qu’elle habite, elle s’imagine selon les contraintes du lieu. « Un projet est d’autant plus remarquable qu’il ne fait rien pour être remarqué », poursuit-il. S’expri­mant dans une rhétorique architecturale contemporaine, Pierre Fauroux ne suit pas pour autant les modes, il défend fermement ses positions. Pour lui, chaque réalisation a une valeur intrinsèque. Ses compagnons de route ? L’ingénieur béton Georges Richiero, aujourd’hui disparu, et l’architecte tessinois Bruno Keller, avec qui il a signé deux réalisations marquantes à Valbonne Sophia Antipolis et bien d’autres projets.

 

Dialogue de volumes simple
Au cœur de la technopole de Sophia Antipolis, Pierre Fauroux a ainsi créé un centre de stockage de jeux électroniques pour Micromania. Plutôt qu’un bâtiment ostentatoire, l’architecte a dessiné un long cylindre associé à un quadrilatère. Deux belles géométries qui se rencontrent dans la simplicité des matériaux. À l’intérieur, se développent des espaces de bureau d’un seul tenant avec un cloisonnement minutieux. Seconde construction emblématique, celle de la Mairie-Eglise de Valbonne, dont les plans ont été exposés au Centre Pompidou en 1991 et à la Biennale de Venise en 1992. « Le projet était marqué par une double contrainte : la très faible emprise foncière pour implanter le programme, qui devait comporter une mairie et une église », détaille Pierre Fauroux. Il décide alors de placer le politique et le religieux dans une même enveloppe en béton brut, avec au rez-de-chaussée l’accueil, au premier étage les services municipaux dont le plafond forme le parvis de l’église, logée dans un cylindre. La mairie, ancrée au sol, ne voit donc pas l’église, dans le ciel, et inversement. L’architecte parvient à concilier les inconciliables de la loi de 1905, en attribuant à chaque espace une fonction claire. Il joue sur les articulations et la circulation de la lumière naturelle.

 

Le mur, élément fondateur
Dans le domaine des villas privatives, Pierre Fauroux a aussi développé ses principes fondamentaux, comme pour la maison Lienart à Vinay, en Isère, récompensée par le Prix Archinovo en 2003. S’affranchissant des codes des bâtisses environnantes, il a obtenu le permis de construire sans réserve pour cette maison minimaliste au toit horizontal, dont un long mur en béton brut ceinture la parcelle. Ses deux vastes blocs rectangulaires, formant la piscine et la maison, mêlent l’acier inoxydable et le verre. Un projet audacieux qui déploie son équilibre, comme une évidence, dans le paysage du Vercors. À Mouans-Sartoux, dans la maison Moro réalisée récemment, on retrouve cette sereine continuité entre un mur de clôture en béton brut qui se pro­longe en une villa aux lignes pures, offrant ainsi à ses habitants un cadre de vie lumineux intégré à son environnement. Ici, les baies vitrées sont comme des radiateurs, les murs retransmettent la fraîcheur de la nuit. Ayant à cœur de transmettre, Pierre Fauroux a donné de nombreuses conférences : « Mon meilleur souve­nir, c’est d’avoir travaillé avec l'architecte du Tessin, Luigi Snozzi, invité à dialoguer avec l'abbaye du Thoronet pour une exposition en 2009. » Son rêve aujourd’hui ? Pouvoir présenter l’histoire de ses projets, à travers des conférences et une exposition sur le thème « Des maquettes, à quoi ça sert ? ».